L’interview de Caroline Drouault

Quelle chance pour Lire-Lire de collaborer avec les Éditions des Éléphants ! Entre les promenades avec Igor et Souky, les albums merveilleux comme Le collier magique, Le caméléon qui se trouvait moche ou La mère des banquises, sans oublier les documentaires comme celui sur les inventrices, nous sommes vraiment gâtés !

Partons à la rencontre de Caroline Drouault, qui va nous en dire plus sur cette formidable maison d'édition.

 

Pourquoi avoir choisi le nom Éléphants pour votre maison d'édition ? 

Caroline Drouault : C’est Ilona Meyer, sa fondatrice, qui en a choisi le nom : l’éléphant évoquait pour elle un animal majestueux et très aimé des enfants. Il est très présent dans la culture enfantine, où l’on croise Dumbo, Babar, ou plus récemment Elmer ou Pomelo. 

C’est un animal sociable, altruiste, qui vit en groupe. C’est un symbole de sagesse et de longévité, de force et d’intelligence. Il a de la mémoire, et il est gracieux !

Notre maison cultive tout cela au fil de ses publications : la force des textes, l’intelligence des documentaires, la mémoire à travers les récits historiques, et la grâce des illustrations. 

 

Comment vos livres se distinguent-ils des autres ?

C.D. : Nos livres s’inscrivent dans une démarche volontairement atemporelle : peut-être se démarquent-ils des autres car ils ne cèdent pas au style d’une époque ?

Nous sommes sensibles aux techniques traditionnelles d’illustration : peinture, aquarelle, gravure, collages, crayons de couleurs… Ils pourraient avoir été créés aujourd’hui comme il y a trente ans.

De la même façon, ils ne répondent pas aux injonctions de la mode : leurs histoires pourraient être racontées dans vingt ans avec la même actualité. Elles sont universelles et parlent à tout enfant, d’ici ou d’ailleurs, d’hier ou d’aujourd’hui.

 

Pouvez-vous nous parler de la série Igor et Souky, que les lecteurs de Lire-Lire connaissent bien ? 

C.D. : La collection Igor et Souky a été créée lors de notre première année d’existence. 

En imaginant cette collection, Ilona Meyer souhait éveiller les enfants à la découverte de notre patrimoine, tout en proposant une vraie histoire, pour ne pas tomber dans le guide touristique. 

Son idée était clairement définie : Igor et Souky seraient issus de cultures différentes et vivraient dans une famille recomposée, à l’image de beaucoup de familles d’aujourd’hui. 

Nous avons fait appel à Sigrid Baffert, pour l’écriture de la série : autrice d’albums et de romans, elle a le sens de la formule, utile pour les dialogues, mais surtout, elle sait créer des univers et des personnages dotés d’une histoire et d'une personnalité qui leur sont propres. 

Cela nous a semblé essentiel : confier ce projet à une autrice de fiction, plutôt que de documentaire, afin d’incarner ces personnages, leur faire vivre des émotions et faire évoluer cette famille. La pêche aux informations pour la partie documentaire, elle, est bien plus facile ! 

Ainsi, chaque titre de la collection est riche d’éléments historiques, scientifiques, ou architecturaux… mais aussi de préoccupations propres aux enfants : les bêtises (dans les égouts, à l’opéra, ou au zoo), le harcèlement scolaire (en classe de mer), ou encore la crainte de voir son papa rencontrer pour la première fois le nouveau conjoint de sa maman (au centre Pompidou), etc.

On voyage beaucoup avec vos livres ! On passe de merveilleux albums en Afrique avant de partir pour l’Asie et même vers le froid des pôles. Est-ce une volonté affirmée en tant qu’éditrice ? 

C.D. : Nos livres font voyager, oui. Ils ont à cœur avant tout d’ouvrir au monde et aux autres, à la différence, à la diversité. Ils sont profondément empreints d'humanisme et proposent des histoires universelles dans lesquelles chacun pourra reconnaître ses propres émotions ou préoccupations. Ils font la part belle aux valeurs de justice, d’intégrité, de courage, de partage, de solidarité et de tolérance. 

Quels sont vos critères de choix pour décider de publier un auteur ? 

C.D. : Nous sommes très sensibles à la « voix » de l’auteur, à sa « musique ». Les textes que nous choisissons sont portés par une véritable écriture. Il faut aussi que le texte soit narratif, qu’il nous embarque dans une vraie histoire, et que cette histoire nous touche, d’une façon ou d’une autre. Qu’elle parle aussi aux enfants, bien sûr ! 

 

Comment se passe la collaboration entre l’auteur et l’illustrateur? 

C.D. : Une fois qu’une histoire est retenue, nous recherchons l’illustrateur le plus à même de se mettre en résonance avec le texte, de le magnifier même, avec son propre univers. 

Parfois, les autrices sont aussi illustratrices et nous proposent des projets avec textes et illustrations. 

Il nous arrive aussi d’imaginer nous-même des projets, comme pour la collection Igor et Souky. Dans ces cas-là, nous recherchons l’auteur le plus à même de s’emparer de ces sujets et un illustrateur qui puisse mettre en scène le propos. 

 

Quel est votre livre préféré parmi les nouveautés  ?

C.D.: J’ai un petit faible pour la bouille de notre petit phoque dans Où est maman ? de l’autrice et illustratrice chinoise He Zhihong. 

C’est un album qui aborde avec justesse de nombreux sujets : au-delà de la question environnementale (le réchauffement climatique et la fonte de la banquise), il explore quelques-unes des grandes émotions des tout-petits : se séparer de sa maman, surmonter ses peurs, gagner en autonomie, tout en mettant l’accent sur l’importance de l’entraide et de la solidarité.

 

Auriez-vous une anecdote à nous raconter dans votre parcours d’éditrice ?

C.D.: Une anecdote ? Notre métier est d’accompagner les auteurs pour que leurs œuvres rencontrent leurs lecteurs. 

Un jour, Soyung Lee est venue nous présenter le projet devenu plus tard Ce n’est pas grave, mon crapaud

Cet album est l’un des piliers de notre catalogue, nous l’adorons pour la finesse des sentiments qu’il exprime et la complexité des relations entre les êtres, si proprement humaines. 

Pourtant, au départ, nous avions refusé cette histoire d’amitié fusionnelle. Dans la première version, l’un des crapauds, dans un geste de jalousie et de rage, jetait un caillou à son ami et le tuait. Il nous a semblé que cette histoire était trop tragique, que la culpabilité portée par le crapaud était trop lourde, trop difficile à réparer.

Soyung est revenue quelque temps plus tard : l’ami ne mourait plus, il n’était que blessé. Le moment où le crapaud parvenait enfin à sortir de sa culpabilité, de son chagrin et de sa colère pour réussir à pardonner nous a tiré les larmes. Le livre était une réussite. 

 

Pour vous un livre doit-il d’abord, faire rire, réfléchir ou rêver?

C.D.: Par le rire ou par l’émotion, un livre réussi est un livre que l’on a envie de relire, car il touche une partie intime de notre être, l’enfant qui est en nous. Il est un phare qui nous rappelle les raisons d’aimer, d’espérer et de vouloir grandir !

 

Un très grand merci, Caroline, de la part de nos jeunes lecteurs ! 

Pour plus d’informations, n’hésitez pas à consulter nos autres posts sur notre application et nos articles d’actualité pour connaître l’actualité avec les nouveautés et nos suggestions de lecture !

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